Les colonies dans les Territoires Palestiniens Occupés, les changements démographiques et le transfert forcé en tant que violation du droit à l'autodétermination

 

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L'établissement et l'expansion des colonies civiles israéliennes dans les territoires palestiniens occupés et leur légalité au regard du droit international sont depuis longtemps une question controversée dans le conflit israélo-palestinien, suscitant des débats aux Nations unies depuis plus de cinquante ans. Établies dans des territoires capturés lors de la guerre de juin 1967, ces colonies se sont étendues au fil des décennies en raison des politiques et des financements gouvernementaux, entraînant d'importantes conséquences géopolitiques. Depuis le retrait d'Israël de la bande de Gaza en 2005, la plupart des préoccupations concernant les colonies se sont concentrées sur la Cisjordanie. Cet article explore le statut juridique du transfert forcé et des colonies en vertu du droit international, analysant leur qualification potentielle en tant que crimes de guerre et activités illégales violant le droit à l'autodétermination, notamment en ce qui concerne leur rôle dans l'ingénierie démographique de la Palestine.

Peuplements et changements démographiques

Depuis 1967, Israël est accusé de mettre en œuvre une politique d'ingénierie démographique - une stratégie de changements démographiques systématiques, soutenues par l’Etat, visant à réduire la présence palestinienne et à altérer de façon permanente la composition démographique - dans le but d'étendre sa propre souveraineté sur les territoires occupés. L'implantation de colons a fait l'objet de nombreuses résolutions des Nations unies depuis les années 1970, qui ont jugé contraire au droit international humanitaire "toute mesure qui modifierait le statut juridique et le caractère géographique des territoires arabes occupés depuis 1967,y compris Jérusalem,  et influerait sensiblement sur leur composition démographique", dont le transfert d'une partie de la population civile israélienne vers la Cisjordanie, y compris Jérusalem.[1]

En 2004, la Cour internationale de justice (CIJ) a estimé que le mur construit par Israël visait à modifier la composition démographique du territoire palestinien occupé en renforçant les colonies illégales et en déplaçant la population palestinienne (avis consultatif sur le mur),[2] violant l'interdiction du transfert forcé de la population civile dans les territoires occupés et entravant gravement le droit des Palestiniens à l'autodétermination.[3] En 2018, Michael Lynk, alors Rapporteur spécial, a dénoncé la politique d'ingénierie démographique, contribuant à une annexion de facto et de jure,[4] mise en place par les autorités israéliennes. Néanmoins, les colonies civiles ont perduré et, en décembre 2022, l'Assemblée générale a adopté une résolution demandant un nouvel avis consultatif de la CIJ sur le statut juridique et les conséquences de l'occupation par Israël dans le Territoire palestinien, y compris les mesures visant à altérer la composition démographique, le caractère et le statut de Jérusalem.[5]

Malgré cette initiative, les colonies israéliennes en Cisjordanie et la violence des colons à l'encontre de la communauté palestinienne ont augmenté ces dernières années[6], et se sont encore intensifiées depuis l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 - à tel point que même les États-Unis, principal allié d'Israël, ont annoncé des interdictions de visa pour les colons en raison de l'augmentation de la violence.[7] Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a récemment souligné que son bureau a accéléré les enquêtes sur les attaques de colons contre des civils palestiniens en Cisjordanie.[8] En outre, les déclarations des autorités israéliennes suggèrent l’intention de reconstruire des colonies dans la bande de Gaza[9] et d’éliminer ou d’expulser les habitants de Gaza de manière permanente.[10]

Occupation et transfert forcé

La qualification de la situation en tant qu'occupation est un élément clé de l'évaluation des colonies israéliennes au regard du droit international. Israël conteste le fait que la Palestine ait le statut d'État[11] et soit soumise à une occupation, du moins en ce qui concerne Gaza.[12]

L'opinion prédominante[13] est que tous les territoires palestiniens sont sous occupation étrangère. Les organes des Nations unies, tels que le Conseil de sécurité[14] et l'Assemblée générale,[15] condamnent régulièrement les violations des droits humains présumées commises par la puissance occupante. La CPI[16] et le CICR[17] considèrent également Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, comme des territoires occupés. Récemment, dans ses premiers rapports de mai[18] et de septembre[19] 2022, la Commission d'enquête internationale indépendante ad hoc a souligné l'existence de « preuves crédibles » et de « motifs raisonnables » pour conclure que l'occupation par Israël du territoire palestinien est désormais illégale au regard du droit international, en raison de sa permanence et des actions entreprises pour modifier la démographie par le maintien d'un environnement répressif à l’encontre des Palestiniens et d'un environnement favorable aux colons israéliens. Ces politiques créent des faits irréversibles sur le terrain et étendent le contrôle d'Israël sur le territoire » dans le but d'annexer de facto et de jure des parties du territoire.[20] L'illégalité de l'occupation en cours a été réitérée par l'actuelle Rapporteuse spéciale, Francesca Albanese.[21] La demande d'un nouvel avis consultatif à la CIJ sur le statut juridique et les conséquences de l'occupation israélienne repose clairement sur l'existence de l'occupation.

La question de l'occupation entraîne d'importantes conséquences juridiques. Premièrement, Israël serait soumis aux obligations découlant du droit de l'occupation. Deuxièmement, le maintien d'une occupation permanente est intrinsèquement illégal, constituant un usage illégal de la force, un acte d'agression et une violation du droit à l'autodétermination. Le recours à l'occupation pour annexer un territoire - comme il est allégué à l'encontre d'Israël - serait encore plus illégal. De plus, la reconnaissance d'Israël en tant que puissance occupante pourrait l'empêcher d'invoquer un droit ad bellum à la légitime défense en réponse à l'attaque du 7 octobre par le Hamas[22] - un acteur non étatique.[23] L'attaque serait qualifiée comme faisant partie d'un conflit en cours et d'une lutte pour la libération[24] - bien que constituant des crimes internationaux et violant le jus in bello.[25]

L'existence d'une occupation déclencherait également l'interdiction du transfert forcé en tant que violation du droit international humanitaire et crime de guerre. Si le transfert forcé peut constituer un crime de guerre et un crime contre l'humanité dans le cadre d'un conflit armé ou en temps de paix, les normes sont plus strictes lorsqu'il s'agit d'une occupation militaire. La quatrième Convention de Genève de 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre,[26] son Protocole additionnel de 1977,[27] et le Statut de Rome de la CPI de 1998[28] interdisent explicitement les transferts forcés et les déportations à l'intérieur ou à l'extérieur des territoires occupés. Cette interdiction vise à préserver la structure démographique et sociale du territoire occupé et à éviter de les traiter comme une conquête. Les évacuations temporaires de zones occupées peuvent être permises dans des conditions spécifiques, par exemple pour assurer la sécurité de la population ou répondre à des besoins militaires impératifs, mais les personnes évacuées doivent être autorisées à retourner chez elles une fois les hostilités terminées. Le transfert forcé de populations dans le but de modifier de manière permanente la démographie, comme la création de zones ethniquement homogènes, constitue un nettoyage ethnique et est injustifiable. Ces instruments interdisent également explicitement l'implantation de colons dans les territoires occupés, ce qui englobe non seulement les transferts directs, mais aussi les mesures indirectes qui encouragent les colons à s'installer dans les colonies par des incitations et la tolérance de la violence collective. Cette interdiction est propre aux situations d'occupation.

Évolution du transfert forcé

Jusqu'au milieu du XXe siècle, les expulsions de minorités et les échanges de populations étaient considérés comme des mesures légitimes et nécessaires pour stabiliser les régions, sous le prétexte que des sociétés démographiquement homogènes garantiraient la stabilité et la sécurité des États-nations. Cette conception a progressivement évolué vers l'interdiction de l'acquisition de territoires par la conquête et des transferts de population vers et depuis les territoires conquis, reflétant une reconnaissance croissante des violations potentielles des droits humains associées aux transferts forcés. Néanmoins, des incertitudes subsistent quant à sa portée et à sa définition.

En droit international humanitaire, on trouve une première référence aux transferts forcés dans le Code Lieber américain de 1863, qui interdit d’"emmener" des citoyens "au loin".[29] La protection de la vie privée et familiale prévue par le Règlement de La Haye de 1907[30] peut également être considérée comme interdisant implicitement les transferts forcés.[31] Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le transfert forcé pendant les conflits armés et l'installation de co-nationaux sous occupation ont été codifiés comme des infractions graves du droit international humanitaire en vertu de la quatrième Convention de Genève et des Protocoles additionnels. Cependant, comme mentionné précédemment, cette interdiction ne s'applique qu'aux cas d'occupation.[32]

Les premières tentatives de criminalisation du transfert forcé avaient également une portée limitée. La Résolution alliée de 1942 sur les crimes de guerre allemands ne mentionnait que les expulsions massive,[33] et la Charte du Tribunal militaire international[34] de 1945 désignait la déportation "des populations civiles dans les territoires occupés" comme un crime de guerre, et la déportation "avant ou pendant la guerre" comme un crime contre l'humanité.[35] Elles excluaient les déplacements forcés internes ou l'implantation de colons et, en tant que crimes poursuivis à Nuremberg, étaient strictement associées à la guerre et aux actions perpétrées par les autorités allemandes.

Les progrès de la justice pénale internationale dans les années 1990 ont donné lieu à des discussions de plus en plus nombreuses sur le caractère illégal du transfert forcé. Un premier pas a été d'inclure "la déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale d'un civil" parmi les infractions graves aux Conventions de Genève de 1949 relevant de la compétence du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie.[36] Cependant, l'accent de ce crime de guerre était davantage sur les transferts individuels que sur les transferts de masse et leurs effets globaux; Brownlie soutenait au contraire que le transfert de population et les manipulations démographiques devaient être reconnus comme "ayant un caractère propre [et] méritant d’être plus nettement définies comme une atteinte à l'ordre public international".[37] L'impulsion pour élaborer un concept de transfert forcé mettant l'accent sur sa nature illégale au-delà des actes criminels contre des individus est ancrée dans deux processus parallèles : la tentative de l'ECOSOC (Conseil économique et social) de promouvoir un instrument juridique international sur le transfert forcé illégal et le travail de la Commission du droit international (CDI) visant à codifier les crimes internationaux.

En 1993, la sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités de l'ECOSOC a présenté un rapport axé sur les transferts de population, y compris l'implantation de colons et de colonies, considérés sous l’angle des droits de l'homme.[38] Le rapport soutenait que le transfert de population, y compris les processus d'"installation de colons" de l'ère coloniale et autres "manipulation démographique" à des fins d'acquisition, d'occupation et d'annexion de territoires, portaient illégalement atteinte à l'exercice légitime de l'autodétermination par les populations concernées et constituaient une menace pour leur existence, pouvant même contribuer à un génocide. Il recommandait également d'interdire les changements démographiques délibérés en tant que forme de transfert forcé illégal en vertu du droit international.

Le projet de déclaration de 1997 sur le transfert de population et l'implantation de colons (déclaration sur le transfert de population), adopté par la Commission des droits de l'homme de l'ECOSOC en 1998, intègre ces recommandations et définit les "transferts de population illicites" comme "une pratique ou une politique qui a pour but ou pour effet de déplacer des personnes à l’intérieur de frontières internationales ou au-delà de ces frontières ou à l’intérieur ou à l’extérieur d’un territoire occupé, sans le libre et plein consentement de la population qui a fait l’objet du transfert et de la population d'accueil quelle qu’elle soit".[39] Les pratiques et politiques "ayant pour but ou pour effet de modifier la composition démographique d’une région dans laquelle réside une minorité nationale, ethnique, linguistique ou autre ou une population autochtone, que ce soit par la déportation, le déplacement et/ou l'implantation de colons [...]" ont également été déclarées illégales.[40] Que ce soit en période de conflit armé, d'occupation ou de paix, les transferts illégaux de population ont été considérés comme des actes internationalement illicites engageant la responsabilité de l'État, en plus de la responsabilité pénale individuelle,[41] et la non-reconnaissance par les autres États.[42] Le rapport final du Rapporteur spécial sur le transfert de population, M. Al-Khasawneh, a rappelé que le transfert de groupes sélectionnés sans leur consentement et les manipulations démographiques par l'implantation de colons violent le droit collectif à l'autodétermination.[43] 

Au cours de ces mêmes années, la CDI a élaboré un projet de Code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité, adopté pour la première fois par l'Assemblée générale en 1991. La déportation ou le transfert forcé de population constituait une violation systématique ou massive des droits de l'homme en temps de paix, qui englobe les expulsions ainsi que les transferts internes visant à modifier la composition démographique d'un territoire ou à déraciner un peuple de ses terres ancestrales.[44] Les mêmes actes sont énumérés comme "crimes de guerre d'une exceptionnelle gravité" pendant un conflit armé, notamment l'établissement de colons (qui pourrait signaler une intention d'annexion) et les changements dans la composition démographique des territoires occupés (considérés comme suffisamment graves pour invoquer un génocide). Cependant, dans le projet de 1996, la CDI a exclu les changements démographiques, jugés trop larges et trop vagues,[45] et a remplacé le concept de colonies par l'interdiction pour la puissance occupante du "transfert [...] d’une partie de sa population civile dans le territoire qu'elle occupe". Deux ans plus tard, dans le Statut de Rome de 1998, la "déportation ou le transfert forcé" ont été listés comme des crimes de guerre en vertu de l'article 8 et des crimes contre l'humanité en vertu de l'article 7.

Le crime de transfert forcé contenu dans le Statut de Rome englobe à la fois les déplacements internes et les déportations transfrontalières, en temps de guerre ou de paix, par des moyens coercitifs, y compris de simples menaces et intimidations.[46] Il vise à protéger les populations contre l'éradication permanente et non seulement les individus bénéficiant d'un statut protégé. Ce crime en tant que crime de guerre s'applique aux conflits armés internationaux et non internationaux.[47] Toutefois, l'implantation de colons est exclusivement érigée en crime de guerre et pendant l'occupation. La puissance occupante ne peut ni transférer ou déporter la population locale, ni transférer des parties de sa propre population dans le territoire occupé, directement ou indirectement.[48] Cela inclut les incitations et la tolérance à l'égard des colonies. Néanmoins, le crime reste lié à la situation d'occupation.

Le raisonnement de ce crime est que seules les puissances occupantes ont un contrôle suffisant pour imposer ou induire des colonies sur des territoires étrangers. Si les colonies parrainées par l’Etat ne sont pas possibles en dehors de l'occupation, leur présence démontre l'existence de l'occupation (sans en être une condition préalable nécessaire). En effet, l'établissement progressif de colonies - souvent accompagné de forces militaires - renforce le contrôle territorial et constitue une occupation "rampante". Le désir individuel de posséder des terres dissimule l'objectif d'annexion de l'État, et les colonies constituent de graves violations du droit international humanitaire et des crimes de guerre.

Si l'on rejette l'idée que les colonies impliquent une situation équivalente à l'occupation, on doit alors accepter la possibilité de colonies parrainées par l'État dans des territoires non occupés. Dans de tels cas, l'implantation de colons sans le consentement des deux populations concernées devrait être interdite, comme le suggère la déclaration sur le transfert de population, car il serait absurde de l'interdire pendant l'occupation, mais pas dans d'autres situations présentant des conditions matérielles similaires. Le problème inhérent aux transferts et aux colonies est la violation du droit à l'autodétermination des populations affectées.

Conclusion

L'établissement et l'expansion intentionnels des colonies en Cisjordanie et, potentiellement, à Gaza ont des conséquences considérables pour le conflit israélo-palestinien. Ils ont entraîné des changements démographiques affectant l'équilibre de la population et fragmentant la présence et la continuité territoriale palestinienne. Cette ingénierie démographique limite la viabilité d'un État palestinien libre et complique la recherche d'une résolution juste et durable du conflit. 

Considérer ces altérations démographiques uniquement à travers le prisme du droit international pénal risque d'être une vision à court terme.[49] Elle devrait plutôt être évaluées à la lumière du droit à l'autodétermination de la population affectée. Comme nous l'avons vu plus haut, les travaux préparatoires de la déclaration sur le transfert de population et le projet de Code des crimes de la CDI visaient à inclure une interdiction explicite et globale des manipulations démographiques délibérées. Selon les Articles sur la responsabilité des États pour faits internationalement illicites,[50] la responsabilité de l'État est engagée en cas de violation grave d'une obligation découlant d'une norme impérative du droit international général.[51] Il s'agit notamment de l'interdiction de la discrimination raciale, du génocide, de l'apartheid et d'autres crimes contre l'humanité, ainsi que de l'obligation de respecter le droit à l'autodétermination et les règles fondamentales du droit international humanitaire.[52] Le transfert forcé - y compris les colonies et autres mesures d'ingénierie démographique - pourrait être considéré comme un acte illicite engageant la responsabilité de l'État.

L'avis prochain de la CIJ sera l’occasion de clarifier les implications du droit international, en élargissant l’avis consultatif sur le mur. La demande a mis en évidence les mesures visant à modifier la composition démographique, le caractère et le statut de la ville sainte de Jérusalem, qui revêtent une importance particulière et sur lesquelles la Cour est expressément attendue. Néanmoins, la CIJ devrait discuter des conséquences de l'ingénierie démographique dans l'ensemble de la Cisjordanie et de la bande de Gaza[53] en réaffirmant que de telles pratiques sont illégales et que les résultats potentiels - tels que l'annexion - ne devraient pas être reconnus.

Comité de rédaction

Julia Grignon, directrice scientifique de l’Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire et membre du Centre de Recherche sur les droits de l’Homme et le droit humanitaire de Paris-Panthéon-Assas

Natacha Bracq, fondatrice et rédactrice en chef de BDIP

avec la contribution de Yann Lemoine, juriste, droit international pénal et droit des conflits armés

 

 

[1] Conseil de sécurité des Nations Unies, Établissement d’une commission chargée d'étudier la situation concernant les colonies de peuplement dans les territoires arabes occupés, S/RES/446(1979) (undocs.org), 34e session, 22 mars 1979, §3.

[2] CIJ avis consultatif, Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, 9 juillet 2004, C.I.J. Recueil 2004 p. 136.

[3] Ibid. §§122-134.

[4] Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les Territoires palestiniens occupés depuis 1967, A/HRC/37/75, 14 juin 2018.

[5] Assemblée Générale des Nations Unies, Pratiques israéliennes affectant les droits humains du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, A/RES/77/247, 77e session, 30 décembre 2022.

[6] Selon un rapport du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme présenté au Conseil des droits de l'homme, la population de colons en Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est, a atteint près de 700 000 personnes réparties dans 279 colonies jusqu'en mars 2023.

[7] SMOLAR P., “Les Etats-Unis adoptent pour la première fois des sanctions contre les colons violents en Cisjordanie”, Le Monde, 6 décembre 2023. Voir aussi : “US announces visa bans after warning Israel on West Bank settler violence”, Aljazeera, 5 décembre 2023.

[8] Voy. en ce sens: CPI Bureau du Procureur, Déclaration du Procureur de la CPI, Karim A.A. Khan KC, depuis le Caire, sur la situation dans l'État de Palestine et en Israël, 30 octobre 2023; CPI Bureau du Procureur, Déclaration du Procureur de la CPI, Karim A.A. Khan KC, depuis Ramallah sur la situation dans l’État de Palestine et en Israël, 6 décembre 2023; CPI Bureau du Procureur, Remarks by ICC Prosecutor Karim A.A. Khan KC at the opening of the 22nd Session of the Assembly of States Parties, 4 décembre 2023.

[9] TIBON A., “Talk of Re-establishing Jewish Settlements in Gaza Strip Damages Israeli Legitimacy, Western Diplomats Warn”, Haaretz, 8 novembre 2023. Il convient de noter que bien que le Procureur actuel ait mentionné la violence des colons, l'établissement même des colonies constitue un crime de guerre imputable aux autorités. Dans la demande de décision de la compétence territoriale de la Cour en Palestine de 2020, l'ancienne Procureur a déclaré qu'il existait une base raisonnable pour croire que dans le contexte de l'occupation israélienne de la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, des membres des autorités israéliennes ont commis des crimes de guerre en vertu de l'article 8(2)(b)(viii), notamment en ce qui concerne le transfert de civils israéliens en Cisjordanie (§ 95).

[10] Voy. en ce sens: ACHCAR G., “Palestine, le spectre de l’expulsion”, Le Monde Diplomatique, 13 décembre 2023; PEZET J., “Que contient le document partagé par WikiLeaks, selon lequel Israël prévoit de déplacer les habitants de Gaza vers le Sinaï ?”, Libération, 31 octobre 2023; SERHAN Y., “Why Palestinians Fear Permanent Displacement From Gaza”, Time, 2 novembre 2023; JABIRI A., “Attack on Gaza: Israeli rhetoric fuels fears of ethnic cleansing as IDF assault continues to push south”, The Conversation, 6 décembre 2023;  Office of the High Commissioner for Human Rights of the United Nations, Israel working to expel civilian population of Gaza, UN expert warns, Communiqué de presse, 22 décembre 2023.

[11] Voir également les allégations d'expulsion massive et de déplacement des Palestiniens à Gaza dans la procédure inter-états devant la CIJ engagée par l'Afrique du Sud contre Israël le 29 décembre 2023, demandant des mesures provisoires pour violations de la Convention de 1948 sur la prévention et la répression du crime de génocide (pp. 37-39, traduction libre) : “Pour de nombreux Palestiniens, l'évacuation forcée de leurs foyers est nécessairement permanente. Israël a maintenant endommagé ou détruit environ 355 000 habitations palestiniennes, ce qui représente 60 % de l'ensemble du parc immobilier de Gaza... contrecarrant toute perspective réaliste pour les habitants de Gaza déplacés de pouvoir rentrer chez eux” (§ 60). Voir aussi, Ministère des affaires étrangères d’Israël, The International Criminal Court's lack of jurisdiction over the so-called "situation in Palestine", Communiqué de presse (anglais), 20 décembre 2019.

[12] Certains universitaires israéliens déplorent l'application de normes moins strictes pour établir la présence d'une occupation que celles normalement requises, à savoir la présence effective d'une armée hostile sur un territoire étranger et la capacité à se substituer à la gouvernance de l'autorité souveraine légitime (voy. par exemple SHANY Y., COHEN A., “Israël-Hamas 2023 Symposium - International law ‘made in Israël’ v. international law ‘made for Israël’”, Lieber Institute, 22 novembre 2023). Cependant, d'autres ont noté que l'article 42 du règlement de La Haye de 1907, qui codifie la définition coutumière d'un territoire occupé, ne requiert que l'établissement et l'exercice d'une "autorité" et non la présence de troupes ennemies sur le terrain (voy. par exemple LONGOBARDO M., “Some Reflections on the Use of Force in the Recent Escalation of the Israeli-Palestinian Conflict”, Armed Groups and International Law, 15 novembre 2023). Selon Milanovic, la question reste contestée dans la littérature (MILANOVIC M., “Does Israël Have the Right to Defend Itself?”, EJIL: Talk !, 14 novembre 2023). Cependant, la plupart des auteurs sont d'accord pour dire que Gaza est occupée. Pour une analyse récente et approfondie de la question, voir JABER S. S. & BANTEKAS I., “The Status of Gaza as Occupied Territory Under International Law”, International and Comparative Law Quarterly, 5 octobre 2023, volume 72 issue 4, pp. 1069–1088.

[13] KATTAN V., “Israeli Settlements, U.S. Foreign Policy, and International Law”, Insight Turkey, volume 22 n°1, 2020, pp. 47–58.

[14] Conseil de sécurité des Nations Unies, Resolution on a durable and fully respected ceasefire and the full withdrawal of Israeli forces from the Gaza strip, S/RES/1860(2009), 64e session, 8 janvier 2009.

[15] Assemblée Générale des Nations Unies, Pratiques israéliennes affectant les droits de l’homme du peuple palestinien dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, A/RES/64/94, 64e session, 10 décembre 2009.

[16] CPI Bureau du Procureur, Situation relative aux navires battant pavillons comorien, grec et cambodgien (Rapport établi au titre de l’article 53-1 du Statut), 6 novembre 2014.

[17] MAURER P., “Obstacles au droit international humanitaire: la politique israélienne d’occupation”, Revue internationale de la Croix-Rouge, volume 94 section française 2012/4, hiver 2012.

[18] Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, Rapport de la Commission internationale indépendante chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et en Israël, A/HRC/50/21, 9 mai 2022.

[19] Assemblée Générale des Nations Unies, Rapport de la Commission internationale indépendante chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et en Israël, A/77/328, 77e session, 14 septembre 2022.

[20] Ibid. §75.

[21] Assemblée Générale des Nations Unies, Situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, A/77/356, 77e session, 21 septembre 2022.

[29] Instructions for the Government of Armies of the United States in the Field (Lieber Code), Article 23, 24 avril 1863.

[30] Convention concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et son Annexe: Règlement concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre, Article 46, La Haye, 18 octobre 1907.

[31] BRANDON E., “Grave Breaches and Justifications: The War Crime of Forcible Transfer or Deportation of Civilians and the Exception for Evacuations for Imperative Military Reasons”, Oslo Law Review, volume 6 issue 2, 17 septembre 2019, pp. 107-124.

[32] L'article 49.1 de la quatrième convention de Genève interdit les "transferts forcés, individuels ou collectifs, ainsi que les déportations de personnes protégées d'un territoire occupé" vers d'autres territoires, tandis que l'article 49.6 interdit à la puissance occupante de "procéder à la déportation ou au transfert d'une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle”.

[33] Resolution on German war crimes signed by representatives of nine occupied countries, Londres, 12 janvier 1942.

[34] Accord concernant la poursuite et le châtiment des grands criminels de guerre des Puissances européennes de l'Axe et Statut du tribunal international militaire, Londres, 8 août 1945.

[35] Ibid. Article 6 (b) et (c).

[36] Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991, Résolution S/RES/827, 25 mai 1993 (actualisé en septembre 2009).

[37] Discours à Nicosie en 1990, Conseil économique et social des Nations unies, Les transferts de populations, y compris l’implantation de colons et de colonies, considérés sous l’angle des droits de l’homme, E/CN.4/Sub.2/1993/17, 6 juillet 1993, §373,  note 291.

[38] Ibid.

[39] Conseil économique et social des Nations Unies, Droits de l’homme et transfert de population. Rapport final du Rapporteur spécial, M. Al-Khasawneh, E/CN.4/Sub.2/1997/23, 27 juin 1997, Annexe II Article 3, p.27.

[40] Ibid. Annexe II Article 6, p.27.

[41] Ibid. Annexe II Article 9, p.28.

[42] Ibid. Annexe II Article 10, p.28.

[43] Ibid. p.16, §§ 50-51.

[44] CDI, Projet de Code des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, 43e session, 1991, Annuaire de la Commission du droit international 1991, volume II(2), Articles 21-22.

[45] BASSIOUNI C., “Human Rights in the Context of Criminal Justice: Identifying International Procedural Protections and Equivalent Protections in National Constitutions”, Duke Journal of Comparative & International Law, volume 3 issue 2, 1993, p.263.

[46] Statut de Rome, Article 7(2)d.

[47] Statut de Rome, Article 8(2)b(vii).

[48] Statut de Rome, Article 8(2)b(viii).

[49]Comme l'ont indiqué Pinto et Mavronicola, "l'hégémonie du paradigme de la responsabilité pénale" risque de se concentrer exclusivement sur la conduite d'agents individuels et d'occulter le contexte systémique dans lequel les événements criminels se produisent : MAVRONICOLA N. and PINTO M., “The Hegemony of Penal Accountability: Some Critical Reflections during (Ongoing) Atrocities”, EJIL: Talk !, 15 décembre 2023.

[50] CDI, Projet d’articles sur la responsabilité de l’Etat pour fait internationalement illicite et commentaires, 53e session, 2001, Annuaire de la Commission du droit international 2001, volume II(2).

[51] Ibid., Article 2, Article 40.

[52] Ibid., commentaire de l’Article 26, §5, pp.223-224.

[53] PELLICONI A. M., “The UNGA request for an ICJ Advisory Opinion on Palestine: The role of demographic alterations in the process of de facto annexation and legal consequences under international law”, City Law Forum, 22 février 2023.

Andrea Maria Pelliconi

Andrea Maria Pelliconi est chargée d'enseignement à l'Université de Nottingham. Auparavant, elle a travaillé dans d'autres institutions au Royaume-Uni, notamment la London School of Economics (LSE) et la City Law School, University of London. C’est dans cette dernière qu’Andrea termine son doctorat sur la pratique de l'ingénierie démographique dans le cadre du droit international public et du droit international des droits humains. Elle est la co-coordinatrice du groupe d'intérêt ICON-S sur la migration et le changement climatique. En 2022 et 2023, Andrea a bénéficié de bourses d'études à l'Université de Bologne (Young Investigator Training Programme) et à l'Institut Max Planck pour le droit procédural international, européen et réglementaire au Luxembourg. Andrea est avocate (non praticienne) au barreau de Rome et, avant sa carrière universitaire, elle a travaillé dans un cabinet privé ainsi que dans des organisations internationales de défense des droits humains telles que l'Institut des droits de l'homme de l'Association internationale du barreau (IBAHRI) et le Civic Freedoms Camp & Human Rights Defenders Programme of the Business Camp & Human Rights Resource Centre (BHRRC). 

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